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île de France Sud, francilienne pour de bon

Alors que la Région pousse au circuit court, la coopérative essonnienne segmente sa production, territorialise son offre et mise sur les filières locales.

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«Nous devons saisir cette chance unique de pouvoir compter 12 millions de consommateurs au bout de nos champs », plaide Hervé Courte, DG d’île de France Sud. Son identité francilienne, la coopérative la revendique encore plus depuis 2016. « Il y a eu, à ce moment-là, une modification de nos débouchés, de la façon dont s’approvisionnaient nos clients traditionnels hors Île-de-France. On s’est donc posé la question : soit on renforçait notre stratégie d’exportation vers Rouen via notre quai de chargement de Corbeil-Essonnes, soit on allait plus avant dans la valorisation et la rémunération de l’agriculteur via de la contractualisation pluriannuelle. » C’est finalement cette dernière option qui est choisie. Ile de France Sud signe alors avec les Moulins Fouché la charte Agri-Éthique et s’engage à payer 180 €/t de blé au producteur base juillet (soit 205 €/t entrée meunerie). « Pour nos adhérents, c’est l’assurance d’avoir une visibilité de leurs prix de vente sur trois ans et de mettre en valeur les actions permettant un gain environnemental », estime Hervé Courte.

De l’Essonnienne à la Francilienne

Dans la foulée, les deux partenaires participent cette année-là à la Foire d’Étampes et se rendent compte que les produits locaux sont invisibles. « C’est là qu’est venue l’idée de se lancer dans un pain 100 % essonnien, local, équitable, tracé, à proposer aux Essonniens, relate Vincent Fouché, DG des moulins éponymes. Assez facile pour nous car 90 % de notre blé vient d’Essonne. On a fait un tour de table avec la chambre d’agriculture, le conseil départemental et le Cervia (désormais nommé « ÎledeFrance Terre de saveurs »), non pas pour nous soutenir financièrement, mais pour les impliquer et leur faire adhérer au projet. »

Et puis, finalement, le 13 octobre dernier, est lancée à La Ferté-Alais (Essonne) la marque de farine et de baguette L’Essonnienne. La farine est vendue à une soixan­taine d’artisans boulangers, à des fermes et dans les rayons d’une douzaine de magasins Intermarché en Essonne. « Finalement, on retrouve plus de la moitié de l’Essonnienne hors Essonne, informe Vincent Fouché. On va même bientôt en livrer à La Réunion. »

L’expérience réussie de l’Essonnienne a d’ailleurs fait bouger les lignes d’une autre filière en gestation depuis une dizaine d’années. Le 22 février, à la veille du Sia, Valérie Pécresse, présidente de la Région, a annoncé la création d’une filière blé-farine-pain 100 % francilienne, qui s’inscrit dans le cadre du Pacte agricole régional. Cette feuille de route repose sur la marque du Cervia « Produit en Île-de-France » (ex-Saveurs Paris Île-de-France), que les Moulins Fouché arborent depuis une dizaine d’années et qu’IDF Sud vient d’être autorisée à utiliser.

« La baguette des Franciliens » devrait être, elle, disponible dans les boulangeries et cantines des lycées dès la rentrée 2019. Le blé sera produit sous la norme NF V30-001 (deux tiers des producteurs d’IDF Sud produisent sous ce référentiel, ex-Arvalis-Irtac) et contractualisé sur trois ans. « Le pain sera issu d’un blé produit en Île-de-France, transformé par des PME d’Île-de-France et consommé en Île-de-France », exposent en chœur Hervé Courte et Vincent Fouché, qui participent avec d’autres OS et moulins de la région à la démarche.

Besoin de stockage à la ferme

Pour répondre à l’ensemble des cahiers des charges de ses clients et inclure ses adhérents non franciliens, IDF Sud a décidé d’engager une démarche d’habilitation label rouge qui comportera l’offre de blé de norme NF V30-001 et le bio. « Label rouge balayant plus large, tout en apportant l’équivalent en valeur de nos filières spécifiques, précise Hervé Courte. Ces différents modes de production visent à permettre aux producteurs de mieux valoriser leurs produits. » La coop voit se dessiner trois portes d’entrées pour ses clients : le signe de qualité (label rouge ou pas), la présence ou l’absence d’insecticides de stockage, et le territoire. « On a, par exemple, des demandes de label rouge sans insecticides de stockage produit en île-de-France. En ce sens, les ATC deviennent des distributeurs de contrats. »

« Mais segmenter, spécifier, contractualiser, cela signifie qu’il faut, derrière, améliorer notre système d’enregistrement et de transmission des données, mais aussi des infrastructures. Certes, on a comme atout d’avoir réorganisé notre dispositif de stockage. On a ainsi fait le choix de dédier un silo à Étampes pour l’Essonnienne. Mais il est évident qu’on ne pourra pas recevoir en moisson toutes ses spécificités. Nous aurons besoin plus que jamais d’un stockage à la ferme qualifié afin d’assurer un allotement fin et de préparer les assemblages pour le moulin. »

Renaud Fourreaux

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